La différence entre information et communication…
… n’est pas celle que croient voir les journalistes. La SRRP réagit à un article de 24 Heures qui propose une vision imprécise de notre métier.
Ce matin, 24 Heures a publié un article sur le nombre de communicant-es qui travaillent pour l’Etat de Vaud. Le texte est accompagné d’un édito qui propose une vision imprécise de notre métier: «Plus de com et moins d’info».
Ce texte semble nourri par des clichés issus de mauvais thrillers politiques. A lire Renaud Bournoud, toutes et tous les professionnels de la communication seraient des spécialistes du mensonge et de l’enfumage qui passeraient leur vie à cacher des informations vitales au grand public.
On ne peut pas garantir que ça n’existe pas: chaque profession connaît des brebis galeuses. Mais la vérité, c’est que pour l’écrasante majorité des communicant-es, le quotidien est bien éloigné du travail des spin doctors de la télé. Plutôt que de dissimuler ou de déformer des choses importantes, on nous demande bien plus souvent de parler de sujets totalement superflus et inintéressants.
Et notre activité consiste justement à dire non. A faire le tri. A pousser notre hiérarchie ou notre clientèle à aborder des thématiques qui correspondent vraiment aux attentes de leurs publics.
La communication n’est pas de la manipulation
Revenons à l’opposition entre information et communication proposée par Renaud Bournoud. Sous sa plume, la première semble noble et intègre, alors que la seconde rime avec manipulation. A vrai dire, la réalité est bien plus complexe. Même si l’information est toujours au cœur de notre travail, elle ne constitue pas toujours un but en soi. C’est là que notre travail diffère de celui des journalistes, dont la mission est précisément d’informer.
Parfois, notre objectif est de transmettre une information, et parfois l’information est uniquement un moyen de poursuivre un autre objectif. On pourra communiquer pour développer un capital-sympathie, par exemple. Ou pour déclencher une action bien particulière: convaincre les randonneurs et les randonneuses de se vacciner contre les tiques, recruter des curatrices et des curateurs, arrêter de fumer, lutter contre l’obésité ou le harcèlement scolaire… voilà quelques sujets sur lesquels les collectivités publiques s’engagent et qui impliquent des changements de comportement.
On est loin de la dissimulation, du mensonge ou de la privation du libre-arbitre de la population.
Cet été, une étude de la Haute école spécialisée des Grisons a mis en lumière la communication des communes et le rôle des médias locaux en Suisse. Elle montre qu’avec la réduction des équipes rédactionnelles, les collectivités n’ont pas d’autre choix que de développer leurs propres canaux de communication. Les expert-es appellent toutefois à une collaboration entre médias et professionnel-les de la com.
La communication a un intérêt public
Maintenant, est-ce que ça veut dire que l’Etat de Vaud fait tout juste? Qu’il pourrait s’en sortir avec une dizaine d’EPT en moins ou qu’au contraire il manque encore du monde à la communication du canton? Impossible de répondre sans connaître les objectifs et la stratégie.
Ce qui est sûr, c’est que notre métier a de la valeur: sinon il ne connaîtrait pas une évolution aussi positive, que ce soit dans les collectivités publiques, dans les ONG ou dans les entreprises à vocation commerciale. Mais cette valeur repose sur notre professionnalisme, c’est-à-dire sur notre capacité à agir de manière responsable, à apporter quelque chose d’utile aux publics avec qui nous sommes en contact.
C’est cette approche du métier que nous cherchons à promouvoir à travers les activités de la SRRP.
Est-ce vraiment moins digne que le travail des journalistes?
Pour la SRRP,
Romain Pittet, coprésident
Dans les épisodes précédents
- Cinquante communicants à l’Etat de Genève: et alors?
- Journalisme et communication: chacun chez soi...